La course au Large connaît une étape importante dans son développement : rêvé, envisagé, reporté puis finalement organisé au départ de Brest donné le 7 janvier 2024, le tour du monde en ULTIM en solitaire est devenu une réalité.
Présentation et revue des forces en présence.
Le parcours est similaire au Vendée Globe avec passage des trois caps ; Bonne Espérance, Leeuwin et Horn avec des zones d’exclusion des glaces. Nouveauté avec la mise en place de zones cétacés identifiées et à éviter en vue de protéger la faune marine. Différence avec le Vendée globe : les routages, partie importante de la performance sont autorisés et surtout les escales sont possibles. L’escale technique permet l’intervention extérieure sur le bateau mais doit durer au minimum 24h. De l’avis général, elle risque d’être rédhibitoire pour la victoire.
Les aventuriers qui vont marquer cette nouvelle étape importante dans l’histoire de la voile sont au nombre de six :
- Tom Laperche âgé seulement de 26 ans, il dispose du dernier bateau de la flotte (SVR – Lazartigue), optimisé et extrêmement aérodynamique avec un cockpit intégré. Tom est accompagné d’un préparateur de luxe, François Gabart qui connait déjà la route à suivre. Ce dernier détient en effet le record depuis 2017 en 47 jours. Gros bémol néanmoins, le team a dû gérer une véritable course contre-la-montre de six semaines pour réparer un problème structurel détecté sur le bateau fin novembre. Avec une remise à l’eau seulement trois jours avant le départ.
- Anthony Marchand, à 38 ans il part pour sa première course en solitaire. Il a une approche psychologique très personnelle : il minimise l’exploit potentiel et montre un niveau de stress voisin de zéro. Aux commandes de l’ancien Macif (rebaptisé Actual ULTIM 3) détenteur du record il peut afficher une certaine ambition d’outsider. En effet le bateau a évolué avec des grands foils et est probablement le plus fiable de la flotte. Il dispose également du soutien d’Yves Le Blevec qui a longtemps été aux commandes du bateau.
- Thomas Coville avec 8 tours du monde, est le marin le plus expérimenté de la flotte. Il a une équipe bien structurée autour de lui depuis très longtemps. Sodebo qui l’accompagne depuis un quart de siècle lui a permis également un fort développement personnel. Approche psychologique systémique dites des Constellations, échange avec des philosophes, musique, tout est bon pour lâcher prise et échapper au stress. Dur au mal, peut-être le plus résilient de la flotte, qualité qui pourrait s’avérer décisive dans cette épreuve personnelle qui va durer environ deux mois.
- Armel Le Cléac’h surnommé « le Chacal ». Après une route du Rhum 2018 particulièrement compliquée et d’autres fortunes de mer, il a enfin ouvert son compteur en multicoque en remportant la dernière Transat Jacques Vabres avec Banque Populaire XI. Libéré, il dispose d’un bateau performant et d’une équipe extrêmement professionnelle autour de lui. Son expérience des navigations autour du monde en IMOCA pourrait peser lourd dans l’approche de cette course où gestion et vitesse moyenne compteront plus que la performance pure (deux fois deuxième et vainqueur en 2017 du Vendée Globe).
- Charles Caudrelier : Son approche est clinique, posée. Multi-victorieux sur de multiples supports, il adore la course en solitaire. Avec le Maxi Edmond de Rothschild dernier né de l’écurie Gitana, il dispose du bateau de référence de la classe, probablement le plus performant. Il a gagné la dernière course en solitaire en ULTIM (Route du Rhum 2022). S’il fallait absolument chercher un point faible, cela serait éventuellement de n’avoir jamais pris le départ d’un Vendée Globe. Un favori incontestable.
- Eric Péron, le dernier arrivant sur Adagio, ex Sodebo-Ultim de Thomas Coville. L’histoire serait belle mais la préparation a forcément été trop courte. Et son bateau ne volant pas, il part simplement pour boucler l’aventure de sa vie.
L’absent : François Gabart
Si son bateau est bien au départ après un chantier express lié à des problèmes de structure post transat Jacques Vabre, François Gabart a laissé la barre à Tom Laperche après une transat de passation. Bruits de Pontons avait pu échanger avec lui sur ce moment que le skipper refuse même de qualifier de simple pause :
« Je ne sais pas comment on peut mettre le mot pause ; Après la Transat Jacques Vabres 2023 et avec un trophée Jules Verne prévu fin octobre 2024, il n’y a finalement que cette course en solitaire que je ne fais pas. J’ai beaucoup d’envie de faire d’autres choses, de naviguer en équipage. Il est difficile de tout faire bien. J’ai une vraie valeur ajoutée à accompagner Tom pour ce tour du monde tout en maintenant des ambitions personnelles fortes sur le trophée Jules Verne. Je me projette sur les deux années à venir sans aller beaucoup plus loin. J’étais très excité de faire la Jacques Vabre et humainement je suis fier de faire émerger Tom sur ce tour du monde » souligne François Gabart.
Ils sont donc seulement 6 à avoir pris le départ de cette course, seul 4 marins ont réussi l’exploit de boucler ce tour du monde sans assistance soit moins que d’hommes ayant marché sur la lune.